22 février 2013

SHOPPING BY PROXY

(by Fal-bla-bla)
 
Vous êtes une shoppeuse forcenée. Finir sur la paille est un passage obligé pour une shoppeuse de votre rang. Vous savez, cette période délicate où telle une Maserati lancée à toute vitesse vous perdez le contrôle et finissez dans le mur ; cette période maudite au cours de laquelle votre famille vous renie, votre frigo vous supplie, votre banquier vous poursuit (vous le voyez dans le rétroviseur, la langue pendante, la bedaine sautillante et l’œil menaçant… ?).
Tout va mal.
Et pourtant, vous ne pensez qu’à une chose : le sacrosaint shopping.
Vous êtes atteinte, ne vous mentez pas ! Vous souffrez, ne pleurez pas ! J’ai LA solution pour vous : le shopping by proxy !
« By proxy ? » Mais si, mais si, vous connaissez cette faculté qu’on a toutes de faire quelque chose sans pourtant s'engager physiquement. Certains diront « par procuration », mais nous on est fancy, alors on dit « by proxy ».
Il y a mille et une manières pour vous de soulager cette fringale de fringues qui vous gagne régulièrement, voire d’y remédier définitivement.  
Vous êtes à sec donc. Cessez de vous morfondre ! Vos parents, votre fameux banquier, la tata, la voisine vous déconseilleront de vous aventurer dans les magasins ! Malheureuse ! Faites fi de ce conseil farfelu : renouez sans délai avec le shopping du samedi après-midi ! Accompagnez vos amies, votre maman, votre sœur, une collègue, peu importe…Et  osez défier les étiquettes qui vous narguent (« je suis trop chère pour toi ! » « tu ne m’auras jamais ! » bla bla bla bla...)
 
 
Vampirisez cette expérience de shopping qui ne vous appartient pas, donnez-vous le sentiment que vous aussi vous succombez, que vous aussi vous flambez, que vous êtes de la fête, saperlipopette ! Jouez les pique-assiette!  Incitez vos proches à dépenser, conseillez, touchez, essayez, humez s’il le faut ! Profitez de chaque seconde pour combler le manque. Le shopping c’est avant tout un contexte, une odeur de neuf (surtout celle du polyester qui excite votre système olfactif), des portants remplis, la promiscuité des cabines, une frénésie collective... Inutile de dépenser un sou, quand on y pense… Shoppez malin, shoppez radin !
Vous souhaitez pousser le vice? Tester vos limites? Vous avez également la possibilité d’acheter des articles (oui ! c’est permis !), de les rapporter chez vous, de les essayer, de vous observer sous toutes les coutures, de pencher la tête en minaudant, l’air dédaigneux (si si ! jouez le jeu à fond !) et bien évidemment de les rapporter en magasin dès le lendemain matin. Cela vous procurera, vous le constaterez, une grande jouissance, le sentiment d’avoir échappé à quelque chose in extremis, d’être sur le fil ;  un peu comme quand, sortant des cabines avec cet article hors de prix, vous vous insérez dans la fille d’attente des caisses, vous vous sentez prise au piège entre ces deux clientes et vous contemplez, l’air affolé, l’idée de laisser choir discrètement l’article de la discorde et de quitter lâchement, et dans les plus brefs délais, ce temple de la tentation... Mais vous ne le faites jamais, n’est-ce pas ? Vous êtes faible et sans volonté. Eh bien - sans mauvais jeu de mots -c’est l’occasion de vous racheter ! Prouvez que vous existez !
Votre carte de crédit ne vous obéit plus ? Embarquez donc dans la grande aventure du shopping virtuel (dans tous les sens du terme). Si vous êtes une petite nature et que le fait de voir d’autres dépenser à votre place vous soulève le cœur (petite envieuse, vous n’avez pas honte ?!), lâchez-vous sur ASOS, Topshop, Monshowroom... Voici le mode opératoire : sélectionnez les articles, choisissez la couleur (allez, décidez-vous !), prenez la bonne taille, imaginez vous dedans (non, pas terribles les fesses… Il vous boudine un peu non ? Arf, ce n’est décidément pas votre couleur ! Next !). Recommencez. Empilez les articles, composez les tenues. Allez-y, faîtes-vous plaisir ! Laissez-vous emplir par ce sentiment de satisfaction, griser par ce désir de possession. Et puis, Et puis ? Et puis, inspectez votre panier. Capturez chaque article du regard et fermez les yeux comme pour l’empêcher de s’échapper dans la jungle numérique alors qu’il serait si bien dans votre penderie. Et puis ? Et puis rien ! Surtout rien ! Fermez-moi cette fenêtre ! Et passez à autre chose !
Vos excès vous clouent chez vous : non seulement vous ne pouvez pas vous acheter de nouvelles pièces, mais vous devez même vous passer des sorties qui vous permettraient de rentabiliser celles qui ont précipité votre chute ! Un scandale ! Alliez « socialisation » et addiction au shopping : rejoignez Pinterest, le réseau social qui vous donne le sentiment de posséder ce que vous ne posséderez jamais. Créez un panneau (votre penderie virtuelle). Parcourez le net et épinglez (rangez, pliez, suspendez) tous les articles qui vous plairont. Et là, plus question d’étiquette ou de carte bleue ; et là, nous ne parlons plus d’ASOS, de Zara ou de Monshowroom. Non non, sur Pinterest vous possédez Gucci, Céline, Marc Jacobs, Fendi, Chanel, Lanvin, Marant...  Sur Pinterest, tout devient possible. Par le truchement d’une opération psycho-intellectuelle dont il me serait difficile de faire état ici sans vous ennuyer, vous possédez, vous touchez et vous humez même, si vous voulez. Il suffit d’y croire. Restez calmes et épinglez !

Et rappelez-vous: qu'importe le bout de chiffon, pourvu qu’on ait l’ivresse !
 
 

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